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jeudi 4 octobre 2012

Ces rendez-vous manqués

J'ai lu un billet fort remuant sur le site de Yoopa. J'adore ce site web, en passant : yoopa.ca. Excellente source d'information, de divertissements, de chroniques et d'humour, pour tous les parents.

Bref, j'y ai lu cet après-midi une chronique de Mylen Vigneault : « Ces rendez-vous manqués : des histoires de fausses couches. »

Je ne vous la résumerai pas ; je vous conseille d'aller la lire.


L'image provient aussi de leur site. Je la trouvais magique. Un bébé, pas tout à fait formé, qui s'échappe, qui s'en va, dans l'univers, qui nous quitte sans jamais vraiment nous quitter. 

Si vous avez lu mon blogue, ou si vous me connaissez, vous savez que j'ai aussi fait une fausse couche. Le 16 mars 2009. Je me souviens de la date, car c'était la première journée à mon nouvel emploi, celui que j'occupe encore aujourd'hui. 

Je trouve aussi, comme l'auteure de la chronique, que notre système ne consacre pas assez de temps et d'énergie et surtout d'empathie, aux très nombreux parents qui vivent le deuil de perdre un bébé avant sa naissance. 

J'ai passé un test de grossesse au début du mois de mars, et il était positif. C'était une surprise, mais une belle surprise. Mon chum sautait de joie, il allait enfin être papa! J'ai commencé par être sous le choc, puis je suis devenue heureuse. J'ai appelé ma maman, ma soeur, mes amies. Puis j'ai fait des plans. J'ai vu mon avenir, avec ce bébé. 

Puis, le 15 mars au soir, je suis allée au cinéma, voir « Dédé, à travers les brumes ». Un film dur, mais magnifique, sur la vie du chanteur des Colocs. J'ai eu mal au ventre tout le long, mais je ne me suis pas vraiment inquiétée. Dans les livres et les sites web, on disait que les femmes enceintes ont mal au ventre en début de grossesse, car les ligaments s'étirent alors que l'utérus prend forme pour accueillir notre petit trésor. 

En revenant du cinéma, je trouve des traces roses dans mes sous-vêtements. Je commence à m'inquiéter sérieusement. Je lis sur internet. Ce que je lis ne me dit rien de bon. Je me couche. Je ne dors pas. 

Le lendemain matin, je vais travailler, ma première journée à mon nouvel emploi. Je commence à 9h, mais j'arrive à 8h. À 8h30, dans les toilettes (que je ne verrai plus jamais de la même façon, même quand j'y retourne après 3 ans) c'est les chutes niagara, mais rouge sang. Rouge vif mêlé à rouge foncé. Vie mêlée à mort. J'appelle mon médecin, qui tristement me confirme que selon lui, j'ai du perdre mon bébé, surtout si j'ai très mal au ventre. Je pleure un peu, je me ressaisis, met une serviette sanitaire et retourne travailler. 

Je passe ma journée de travail. Je prend une pause pour appeler ma maman et lui annoncer qu'elle ne sera probablement pas grand-maman, finalement... 

Je me sens pas mal seule. 


Je finis ma journée, puis j'appelle mon chum pour lui dire que je vais aller à l’hôpital juste à côté. J'arrive à l'urgence. J'y vois une salle bondée de malades. Une femme est en train de mourir d'une crise d'asthme sur les bancs. Littéralement, mourir là, live, devant plein de monde qui ne peuvent rien y faire. Une amie ou une soeur crie, hurle après le personnel, qui n'est pas là, pour qu'on fasse quelque chose. Vision d'horreur. On est au Québec non? Il ne me semblait pas qu'on mourrait dans les urgences, faute de personnel. 

Je vais voir un infirmier au triage. Je lui dis : « Je suis en train de perdre mon bébé. » Il me dit : « Il y a 36 heures d'attente, ça ne vous sert à rien de rester ici. » Je le regarde. « Je pense que vous n'avez pas compris. Je suis en train de perdre mon bébé. Là, maintenant. Il sort de mon corps, il meurt. » Il me regarde d'un air désolé. « Combien de semaines de grossesse? » Six. Je sais, c'est pas beaucoup, mon bébé ne mesure que la grosseur d'un pois chiche. MAIS IL EST EN TRAIN DE MOURIR PAREIL. 

Il me dit qu'il ne peut rien pour moi, qu'il est vraiment désolé, et d'aller à la polyclinique en face. Je vais à la polyclinique. On me donne un numéro. Vers 8h45 le soir je vois un médecin, qui me fait un examen gyneco. Il dit ne rien percevoir, outre la quantité phénoménale de sang. Me book pour une échographie à l'hôpital le lendemain. Ne peut rien faire de plus. 

J'arrive le soir, je suis en larmes, démolie. Personne ne comprend, sauf mon chum. Il essaie de me consoler, mais il a aussi mal que moi, j'en suis sûre. Mes amis ne comprennent rien. Ce n'est pas leur faute. 

Le lendemain, à l'hôpital, le radiologiste ne voit rien. Mon utérus est complètement vide, comme s'il n'y avait jamais eu de bébé. Je le vois dans sa face : il pense que j'ai imaginé ma grossesse. Je peux vous montrer les 3 tests positifs qui prouvent le contraire. Mais au fond, tout le monde s'en fout. Le bon côté : je n'ai pas besoin de curetage. Un stress de moins. 

Commence la longue période de platitudes ultimes « Tu en auras un autre. » « Il était probablement mal formé. » « 20% des femmes ont des fausses couches, c'est normal.» « Arrête de t'en faire. » « Ce n'était pas le bon bébé au bon moment. »

Toutes plus pénibles les unes que les autres. Le monde pense qu'on ne mérite pas de faire un deuil quand on perd un foetus, parce qu'il n'était pas encore né. Pire, le monde se permettent de juger qu'à 6 semaines de grossesse, c'est presque comme s'il n'avait jamais existé (car à 4 semaines ce sont les règles) alors on est pas justifiées d'avoir mal ou de souffrir, comme les mères qui perdent un bébé à 20 semaines de grossesse. 

Je peux concevoir que c'est plus difficile de perdre un bébé à 5 mois de grossesse, c'est certain. Mais ça ne veut pas dire que je n'avais pas un plan, que je n'avais pas déjà un avenir pour ce bébé, pour ma famille, que je ne l'aimais pas déjà. Ça ne veut pas dire que j'ai moins de peine. 

Je n'ai pas pu le voir. Je n'ai pas pu lui dire au revoir, l'enterrer. Il est mort dans les putain de toilettes de mon boulot. Sans aucun soin médical, ni pour lui ni pour moi. Quelle injustice. 

Quand je suis retombée enceinte, j'ai demandé à être suivie plus tôt par l'obstétricien car j'avais déjà perdu un bébé. On m'a répondu que si je n'avais pas fait au moins 3 fausses couches, ce n'était pas justifié. Quelle connerie. On attend de faire vivre 3 deuils à un couple, avant de s'assurer que la maman sera suivie convenablement. Sinon, pas de rendez-vous chez le médecin avant la 12e semaine. Quelle insensibilité. 

Heureusement pour moi, ma 2e grossesse s'est bien passée, et mon trésor, mon soleil, mon Damien est né le 13 janvier 2010. Mais quand je retomberai enceinte, j'aurai toujours peur de revivre cette froide insensibilité de notre système de santé, cet insupportable moment, où un membre du personnel de santé est capable de vous annoncer la mort de votre bébé, la chair de votre chair, sur le même ton qu'on vous dirait que votre billet de 6-49 est non-gagnant. 


mercredi 3 octobre 2012

Ma montée de lait : les AVAC et tout le reste

Ça mange quoi en hiver, un AVAC? C'est un accouchement vaginal après césarienne.

Introduction et raison de ma montée de lait : De nos jours, les mamans, on se fait tellement juger. Sur tout. Sur chaque mot, chaque geste, chaque biberon, T-O-U-T. C'est tellement épuisant.

Si on mange trop pendant la grossesse on exagère, si on ne mange pas assez on ne pense pas au bébé. Si on boit un verre de vin on est une future mère indigne, si on n'en boit pas on est une puritaine qui exagère et qui prend tout à la lettre. Si on mange ce qu'on veut on ne fait pas attention, si on évite la viande rouge, les fromages au lait cru et les sushis on est des maniaques. Si on accouche naturellement mais avec une épidurale on est des petites natures, si on ne la prend pas on est masochistes ou hippies. Si on accouche naturellement un cas de siège on met le bébé en danger, si on a une césarienne on n'est pas une vraie femme comme dans le temps. Si on allaite c'est bien mais pas en public! Si on n'allaite pas, on ne fait pas ce qu'il y a de mieux pour nos enfants. Si on allaite 2 mois c'est pas assez, si on allaite 18 mois c'est vraiment trop et malsain! Si on leur donne de la purée achetée on est paresseuses et c'est mauvais pour leur santé, mais si on fait nos purées maison on passe pour des «Bobos» prétentieuses et «péteuses de broue». Si nos enfants sont propres à 2 ans c'est vraiment trop tôt, on a sûrement scrapé leur estime de soi en les forçant, mais si nos enfants ont encore des couches à 3 ans, ils sont sûrement paresseux. Si nos enfants sont sages comme des images on les a sûrement empêchés d'exprimer leur créativité, mais s'ils font les fous et exigent l'attention des adultes ils sont mal élevés. Si on les fait vacciner on contribue à l'épidémie mondiale de cancer et autres maladies en détruisant leur système immunitaire à grands coups de bouteilles de purel, si on ne les fait pas vacciner on est responsable du retour en force de la coqueluche.

Est-ce que j'ai vraiment besoin de continuer? C'est insupportable.

Et vous voulez savoir le pire? C'est quand on reçoit ces reproches de la part de ceux qui n'ont pas d'enfants.

Je voudrais pas être impolie là, mais sérieux, et je me permet de citer Patrick Huard, FERMEZ VOS YEULES.



Quand on sait pas de quoi on parle, on ferme sa yeule.

Et quand on a pas eu de césarienne, on ne dit pas à une maman qu'elle n'a pas «vraiment» accouché, comme les femmes dans le temps, comme les femmes de cro magnon.

Premièrement, les femmes dans le temps, elles avaient une espérance de vie de 35 ans. Calculez-le comme vous voulez, mais c'est clair qu'un cas de siège en accouchement naturel, ça devait tuer une maman sur deux, si ce n'est pas davantage.

Deuxièmement, pour les femmes de cro magnon, ça devait être encore pire. Tout ce qu'elles avaient pour se soigner c'est des plantes pis des shamans. Entre une tisane de framboisier pis une incantation sous une quelconque boucane d'encens de tilleul pour demander au grand esprit des ours de sauver l'enfant (et non pas la mère, évidemment) il devait y avoir un taux de succès assez minime pour ce genre de naissance.

Alors quand une femme ose me dire que moi, qui ai porté mon gars, mon bébé de 9 livres et 15 onces, pendant 39 semaines et demi, et qui l'a mis au monde, qui l'a aimé, qui l'a allaité, nourri, cajolé, consolé, éduqué, élevé, que moi je ne suis pas une vraie mère qui a eu un vrai accouchement... sérieux, FERME TA YEULE. SURTOUT si tu n'as pas eu d'enfant.

Et quand on ne sait pas de quoi on parle, on ne dit pas à la dite maman qu'elle devrait vraiment tenter un AVAC, pour son prochain bébé, parce que tsé, ça lui donnerait l'opportunité de vivre une VRAIE naissance.

Un accouchement, c'est terrifiant. Toutes les mamans le savent. Toutes les mères ont toute mon admiration.

Une césarienne, je m'excuse mais c'est terrifiant aussi. Une anesthésie presque générale, qui en moins de 2 secondes fait disparaître les sensations de 80% de ton corps, c'est surréel et très épeurant. Une coupure de 20 cm dans ton ventre, ta peau et tes muscles, c'est complètement hallucinant.  Ne pas être capable de marcher pendant 1 mois par la suite, c'est très difficile. Mais tsé, c'est pas VRAIMENT un accouchement.


Est-ce qu'on oserait dire à un malade qui a un pacemaker qu'il est pas vraiment malade du coeur, parce que «dans le temps» il serait juste mort pis ça serait plate de même? Je ne crois pas.

Dirait-on aux malades du cancer qu'ils sont faibles car dans le fond, la chimio, c'est pas naturel, pis ils ne devraient pas vivre si on vivait encore «dans le temps»? Je ne crois pas.

Ce sont ces avancements de la médecin qui permettent à l'espérance de vie de monter. Comme la césarienne permet de sauver la vie de millions de bébés et de mamans.

Pourquoi la césarienne est-elle autant stigmatisée?

Je suis d'accord que les femmes qui demandent une césarienne par simple peur de l'accouchement naturel ne devraient pas le faire. Choisir d'avoir un enfant, c'est choisir d'accoucher. Par contre, quand une condition médicale l'exige (par exemple, un bébé de 10 livres en position de siège dans un bassin trop étroit pour lui permettre de passer sans tuer sa mère), je crois qu'on devrait s'informer avant de juger.

Et si la maman a peur de tenter un AVAC, parce qu'elle n'a pas envie de risquer sa vie, de déchirer sa cicatrice de 20 cm sur le ventre et sur ses muscles, qui lui fait encore mal après 3 ans, parce qu'elle a peur de pousser pendant 36h pour finalement entendre un médecin lui dire «Ça ne marchera pas et le bébé est en détresse, on va faire une césarienne d'urgence», parce qu'elle veut mettre toutes les chances dans la survie de son bébé, si à cause de tout ça, elle ne souhaite pas tenter un AVAC, peut-on lui dire qu'elle sera une bonne maman pareil?